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CRM – XRM, retour vers le futur!

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Je donnais récemment une conférence sur les concepts opérationnels derrière les CRM (Customer Relationship Management), conférence pendant laquelle je profitais de l’occasion pour introduire la notion moins familière de XRM (Extended Relationship Management).

C’est très intrigué que j’ai dû répondre à une vague de questions liées à l’opérationnalisation de base d’un CRM plutôt, par exemple, qu’à des questions axées sur une vision du type « Qu’est-ce que je pourrais faire de plus dans le futur avec mon CRM, quelle serait ma prochaine étape? ».

Je vous partage quelques conclusions de cette rencontre forte intéressante en souhaitant que mes propos puissent servir dans le cadre de vos projets actuels ou futurs de CRM/XRM.

Un peu d’histoire

La quête de gestion des relations d’affaires, ainsi que des outils pour la supporter, n’est pas nouvelle. C’est l’étendue et le degré de cette gestion relationnelle qui se sont accrus dans le temps. Sous forme très succincte, voici l’évolution des outils de ce domaine en quatre moments importants :

1980 : Le domaine de recherche connu sous le libellé « CSCW – Computer Supported Cooperative Work » émerge à peu près en même temps que l’appellation « Groupware » (logiciel de groupe) associée davantage à la technologie supportant les concepts CSCW.

1990 : Des offres commerciales structurées s’installent concrètement dans le marché avec la promesse d’optimiser les communications dans une équipe de travail. Le logiciel « Lotus Note » est un ambassadeur issu de cette période.

2000 : L’introduction d’une offre CRM claire dans le monde du logiciel avec l’arrivée, parmi d’autres, de la désormais très connue compagnie « Sales Forces ». L’objectif principal exprimé est de doter les entreprises d’un outil appuyant l’automatisation et l’optimisation de la force de vente. On voit apparaitre les notions d’automatisation de la force de vente (SFA – Sales Force Automation) et de vision « 360 degrés » qui visent la maximisation du potentiel client.

2007 : La notion de plate-forme XRM apparait. Fréquemment associé davantage à une façon de faire plutôt qu’à une technologie spécifique comme telle, l’objectif principal poursuivi devient l’automatisation et l’optimisation des processus d’affaires d’une entreprise dans leur globalité. De nouveaux horizons de performance corporative sont découverts et continus de l’être.

Un constat

Ce n’est pas un hasard si les concepts des CSCW se sont d’abord matérialisés sous des outils dédiés à la force de ventes. Les ventes c’est le nerf de la guerre comme le dit l’expression consacrée. Il va également de soi de dire que les ventes, c’est avant tout la gestion du « relationnel ». Donc, pas surprenant qu’on ait dirigé rapidement les possibilités de gestion communicationnelles des outils CRM vers cette composante stratégique de toute entreprise.

Les ventes, c’est aussi une enclave de gestion passablement contrôlée, isolée, avec un objectif très clair. Une équipe de ressources s’appuyant sur des processus, une méthodologie et une théorie marketing bien établie. J’entends ici que l’ambiguïté opérationnelle est en principe moins présente.

Je fais une distinction ici entre le volet « Marketing », où il est davantage question d’analyse, de positionnement, de différenciation et de stratégie commerciale, et le volet « Force de ventes » qui déploie le plan d’action sur le terrain. Bref, quand on fait partie des ventes, on doit se rappeler constamment le mantra « Just do it! ».

Donc des concepts et des outils dans un environnement contrôlé et, pourtant, en revenant à ma conférence, des utilisateurs qui m’exprimaient leur volonté, mais aussi leurs difficultés et leur réticence à aller de l’avant avec un projet CRM même si ce dernier se limitait à l’équipe de vente.

La raison fondamentale est bien simple et les participants l’ont exprimé très clairement. Évidemment, chacun à leur façon dans leur contexte selon les objectifs qu’ils poursuivaient avec leur projet. La force de ventes, même avec un plan d’action marketing clair et précis, n’opère pas réellement en vase clos.

Certains reviendront ici à la notion de « vision 360 degrés ». Je dis « pas tout à fait » si on se limite à la force de vente uniquement. Je dis « d’accord » si nous parlons des enjeux « Client » vus dans l’ensemble des interactions de l’entreprise, tout département interpellé, avec sa clientèle existante et potentielle.

Dans cette dernière optique, on perçoit aisément la complexité de gestion issue de la dynamique interdépartementale. En effet, chaque département ayant ses responsabilités et son rôle précis, il est naturel que les visions respectives de chaque département s’entrechoquent.

Voilà un constat de fond résumé par les participants quant aux difficultés qu’ils rencontrent dans leur projet CRM actuel : la complexité de consensus interdépartemental autour d’une façon de faire pour atteindre des objectifs donnés.

Le choix de l’outil

Les logiciels CRM pullulent et vous avez donc un vaste choix à votre disposition. Il n’est pas de l’objectif de ce billet de faire une analyse comparative des principaux produits sur le marché. Pour ceux que cela intéresse, vous pouvez consulter une liste de CRM connus en ligne. Bien sûr, demeurez prudent sur l’interprétation du classement. Je n’ai pas évalué la méthodologie, ni validé la source en détail des différentes informations.

Au-delà des caractéristiques fonctionnelles usuelles, je vous suggère deux validations à faire en profondeur si vous envisagez d’évoluer progressivement vers une plate-forme XRM étendue. Votre logiciel CRM devrait posséder :

1. Une grande capacité de personnalisation de l’information en fonction de vos enjeux stratégiques. Vous devez être en mesure de concilier, d’analyser et d’exploiter rapidement l’information stratégique pour chaque département.

2. Une grande capacité de configuration des accès à l’information. Je ne parle pas ici de l’aspect sécurité qui doit évidemment être présent, mais plutôt de la capacité de votre outil technologique à moduler l’accès à l’information en fonction des besoins opérationnels de chaque département.

Autrement dit, si vous souhaitez optimiser le levier de votre implantation, faites en sorte que chaque département puisse accéder à l’information dont il a besoin, mais seulement l’information dont il a besoin. Sinon, vous pourriez réduire le centre d’attention opérationnel de chaque département sans vous en apercevoir immédiatement.

La centralisation de l’information

Une majorité d’échecs ou de succès mitigés d’implantation CRM proviennent de la difficulté à définir une référence d’information centralisée. Bien sûr, si vous optez pour une solution du type « Cloud », inutile d’aller plus loin comme, de facto, vous opérez en mode centralisé.

Pour ceux qui vivent actuellement ou envisageraient une solution locale, rappelez-vous qu’il devient impératif de créer une référence informationnelle centralisée. Vous devez éliminer le réflexe d’accès à une information locale (sur un poste de travail donné) pour toute information liée à un client, sinon votre projet de CRM est en péril dès ses premiers jours d’existence.

Aussi minimale que cette information puisse être au départ, par exemple simplement les coordonnées de communication du client, générer rapidement le réflexe d’adhésion à l’information centralisée est primordial.

Cette étape vous permettra, entre autres, de soulever et de vivre également toute la question de la standardisation de la codification de l’information client. Cette normalisation est cruciale pour stimuler l’appropriation de l’outil par les utilisateurs et pour générer du levier d’analyse et, par la suite, du levier décisionnel. Par conséquent, ne négligez pas les efforts de mobilisation de votre équipe sur l’enjeu de la centralisation de l’information s’il y a lieu.

La face cachée du succès

Que vous souhaitiez limiter votre projet CRM uniquement à votre équipe de ventes ou que vous souhaitiez étendre l’utilisation de votre logiciel pour constituer une plate-forme XRM, toute la question de l’analyse des processus de gestion impliqués demeure un enjeu critique.

Comme pour tout autre projet de gestion informatisée, l’implantation d’une solution CRM-XRM est un moment privilégié pour améliorer l’efficacité de vos processus en place sans les dénaturer et perdre de vue les façons de faire qui ont créé votre succès. Dans cette optique, vous ne devez jamais oublier qu’une gestion de projet rigoureuse est toujours votre meilleur allié.

Maintenant, il y a un aspect additionnel que je souhaite amener à votre attention au niveau de la phase de déploiement et d’opérationnalisation de votre outil CRM-XRM.

Il y a, à la base de la notion des CSCW, quelques principes opérationnels fondamentaux qui doivent être respectés et appliqués pour garantir la génération du levier que vous recherchez. Malheureusement, ils sont souvent oubliés ou négligés.

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Je vous réfère d’abord à la matrice « Temps-Espace » de Johansen (1988) qui constitue une référence théorique historique pour tous les logiciels de groupe (Groupware). Cette matrice présente les communications et les interactions dans une équipe de travail en fonction des combinaisons possibles de deux paramètres que sont l’espace et le temps.

Je ne vais pas plus loin dans le détail de la théorie opérationnelle sous-jacente. Pour le théoricien en vous, je suggère une publication complémentaire de 2007 endossée par Elsevier (http://www.elsevier.com/) et titrée « A Classification Method for CSCW Systems ».

Le principe structurant à saisir ici, c’est qu’un outil CRM-XRM agit comme un différentiel de gestion. Un peu comme le rôle que joue le différentiel sur votre voiture lorsque vous prenez une courbe et qu’il faut gérer la différence de rotation entre la roue intérieure et la roue extérieure.

En fait, la clé des CRM-XRM, c’est qu’ils gèrent les différences de disponibilités, de vitesse d’exécution, de processus, etc. auxquels font quotidiennement face les ressources d’une entreprise à travers leurs interrelations internes et externes. Tous les écarts ou désynchronisations opérationnels à gérer étant toujours liés aux notions de temps et d’espace.

Pour arriver à activer la magie des CRM-XRM, j’attire maintenant votre attention sur la structure simplifiée d’une interrelation entre deux ressources :

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Nous sommes toujours en présence d’un déclencheur (Trigger) qui fait une demande à un faiseur (Doer), un transmetteur qui garantit que la demande est transmise à la bonne personne au bon moment (votre outil CRM-XRM) et, finalement, le faiseur lui-même. Notez la boucle de rétroaction qui souligne la possibilité d’un processus itératif si nécessaire pour compléter la tâche à faire.

Voilà pour la mécanique à la base de la magie opérationnelle des CRM-XRM. Maintenant, voici les principes de base qui sont fréquemment oubliés, non connus ou négligés dans le cadre de l’utilisation de ces outils en fonction de chaque intervenant dans le processus:

Responsabilités du déclencheur

1. Il doit s’assurer que la demande est claire et précise sinon il augmente automatiquement le temps de traitement et le délai d’exécution, car le faiseur lui redemandera automatiquement des précisions sur l’action à poser. Une lacune très fréquente liée au fait que le demandeur a toujours l’impression que ce qu’il écrit, ou dicte, est parfaitement clair. C’est effectivement clair pour lui, mais ne l’est pas nécessairement toujours pour le faiseur. On perçoit ici toute l’importance de l’établissement d’une norme de codification des demandes.

2. Expédier la demande au bon faiseur sous-entendant à la bonne ressource possédant les qualifications, les compétences et les responsabilités pour répondre à la demande. Sinon, cela va de soi que des délais de traitements seront introduits dans le processus d’exécution.

3. Il doit indiquer avec précision la priorité de traitement à accorder à sa demande. Rappelez-vous ici, quand tout est urgent, la possibilité de priorisation n’existe plus, il n’y a plus de gestion efficace des urgences. Le sous-entendu ici est de porter une attention particulière à la définition de ce qu’est une urgence comme prérequis.

Responsabilités du transmetteur

Le support de transmission et le différentiel de gestion comme tel. La fiabilité et la performance de l’outil technologique sont des paramètres critiques, sinon la crédibilité du système est automatiquement attaquée.

Responsabilités du faiseur

1. Valider immédiatement qu’il représente l’intervenant nécessaire pour répondre la demande en termes de rôle et fonctions ainsi qu’en termes de compétences et de connaissances. On voit ici rapidement l’efficacité d’un CRM à détecter éventuellement les besoins de formation continue d’une équipe.

2. Prendre immédiatement une décision sur la demande à savoir si elle doit être satisfaite maintenant ou plus tard. Si l’action peut ou doit être reportée, il faut planifier immédiatement son suivi ou son exécution au calendrier de travail.

La plus grande lacune rencontrée dans le cadre de l’implantation d’outils CRM-XRM est l’absence de décision sur une demande. Pour qu’il y ait gestion effective d’une situation, il faut prendre une décision éclairée et comme une décision éclairée n’est pas le fruit du hasard, un processus d’analyse minimale doit donc s’opérer dans le traitement de toute demande.

Notez qu’il faut distinguer « prendre une décision » et « satisfaire la demande ». Il s’agit de deux choses complètement différentes. Une décision peut être à l’effet de ne rien faire pour le moment, mais dans ce cas, je répète, il faut planifier immédiatement la date de suivi ou d’action au calendrier.

L’erreur classique est donc de laisser en suspens des demandes sans qu’elles aient fait l’objet d’une analyse de gestion minimale. En plus de ne pas être dans l’action, vous accumulez des problèmes potentiels dans le futur.

Prenez quelques instants pour réfléchir à ce principe. Il s’agit de la clé de voûte pour générer un levier de base avec un CRM. Tout se trouve uniquement dans ce principe.

Si chaque demande reçue ne fait pas l’objet d’une analyse minimale immédiate, vous ne gérez pas même si vous croyez le faire et que vous êtes très occupé!

Prenons maintenant le principe dans le sens inverse pour faire apparaitre l’autre situation problématique classique. On s’en doute, si l’idée est de ne rien laisser en suspens, il s’agit de satisfaire toute demande immédiatement!

Et voilà qu’un mode de gestion réactive se trouve maintenant amplifié par un outil qu’on dédiait initialement à une gestion plus précise, plus efficace.

Sous l’hypothèse de fonctionnement à capacité opérationnelle finie, en mode de gestion réactive, le processus de décision éclairée est fortement affecté sinon inexistant.
Par exemple, on ne réfléchit plus à savoir qu’elle serait la demande nécessitant le traitement prioritaire face à deux demandes de priorité équivalente.

Aussi bizarre que cela puisse paraitre, à vouloir tout faire immédiatement, une équipe de travail peut arriver à réduire son efficacité simplement parce qu’elle ne fait pas les bonnes choses au bon moment.

3. Au moment de satisfaire la demande, d’y répondre adéquatement, le faiseur doit s’assurer de documenter avec clarté et précision ses actions puisqu’il représente le dernier maillon du processus et, plus encore, s’il doit retourner le résumé de son intervention au déclencheur.

Le faiseur est donc face à la même responsabilité de documentation claire et précise que le déclencheur.

Notons que la clarté et la précision de la documentation autant du côté du déclencheur que du faiseur sont des valeurs sûres pour préparer les leviers futurs de votre outil CRM-XRM. Si vous le souhaitez, cette documentation peut devenir la pierre angulaire d’une éventuelle banque de connaissances corporatives. Cette dernière peut constituer ensuite les fondations de règles d’affaires supportant l’automatisation de processus.

Conclusion

Il est fort intéressant de constater que le domaine logiciel de gestion collaborative fait ressortir à nouveau des règles tel qu’un outil technologique ne peut corriger un mauvais processus de gestion, une mauvaise façon de faire. À ce titre, un CRM est un outil et non une solution.

D’ailleurs, dû au nombre habituellement plus grand d’utilisateurs, les logiciels collaboratifs amplifient davantage les lacunes de gestion que tout autre type de logiciel. Plus l’outil que vous choisirez sera performant, plus vous aurez rapidement le « feedback » de vos déficiences opérationnelles.

Mes recommandations à ce billet sont évidemment de nature très terrain. C’est malheureusement au niveau de principes de base qu’on retrouve les erreurs les plus fréquentes et, par conséquent, que les projets de CRM-XRM sont mis en péril avant même d’avoir pris leur élan.

Une fois ces principes de base bien maitrisés, vous pourrez aisément passer aux étapes suivantes, tel que le BI (Intelligence d’affaires), pour extraire du levier additionnel de votre plate-forme CRM et évoluer vers une plate-forme XRM.

N’hésitez pas à communiquer avec moi pour des questions plus spécifiques. Bonne gestion!

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